La SACEM tend la main à Creative Commons

Le 1er janvier 2012, la SACEM a signé un accord avec Creative Commons s’engageant ainsi à gérer les œuvre sous licence Creative Commons ne permettant pas d’utilisation commerciale. En d’autres termes, il est maintenant possible pour un artiste membre de la SACEM de laisser «monsieur-madame tout le monde» copier, partager et modifier son œuvre à souhait, en autant que cela soit par pur plaisir, sans possibilité d’en tirer un profit commercial.

L’accord constitue un projet pilote d’une durée de 18 mois. Ceci est le 4ième projet pilote du genre, après ceux entre Creative Commons et la BUMA/STEMRA (Pays-Bas), la KODA (Danemark) et la STIM (Suède).

Le symbole connu © (pour Copyright) apposé sur une œuvre indique que tous les droits relatifs à l’œuvre sont réservés exclusivement à son créateur. Sans permission préalable, la copie d’une œuvre ©, son partage à un ami ou son remix constitue une violation aux droits de son auteur. Le droit d’auteur est en quelques sortes un ©adena sur l’œuvre censé la protéger. En France donc, c’est la SACEM (Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de musique) qui gère le droit d’auteur de ses membres.

Or, depuis déjà quelques temps, on observe une tendance lourde chez les créateurs à vouloir «délivrer» leurs créations des restrictions du droit d’auteur; Dans un article que j’ai publié récemment sur le blogue Bang Bang, je révèle que 74% des artistes québécois recensés sur Bandcamp.com flirtent avec la gratuité, tandis que près de 39% proposent leur musique sous une licence Creative Commons.

Creative Commons?

Le Creative Commons n’est pas une société de gestion de droit. C’est un outil gratuit offert aux créateurs, leur permettant d’indiquer facilement et clairement à «monsieur-madame tout le monde» ce qu’ils peuvent faire ou ne pas faire avec l’œuvre en question. J’en parle en détail dans l’article «Creative Commons 101».

Déjà depuis 1986, on retrouve le code source libre (ou Open Source) dans le domaine de l’informatique. Ce mouvement maintenant fort répandu est fondé sur l’idée que la mise en commun du pouvoir créatif de programmation de logiciels permet une avancée technologique plus rapide, sans avoir constamment à réinventer la roue. Bref, en informatique, on reconnaît déjà depuis 25 ans que la création pure n’existe pas; qu’on s’inspire toujours d’autres créations pour créer une nouvelle application; qu’on ne commence jamais rien à partir de rien.

En culture, en peinture, en littérature, en danse ou en musique, c’est aussi le même principe. La création pure n’existe pas. On s’inspire nécessairement des créations précédantes pour créer du neuf. Par exemple, on compose des millions de chansons avec les mêmes 7 notes, les mêmes 12 demis-tons. Normale que ça finisse par se ressembler! Les 43 dernières secondes de la chanson Ni**as In Paris de Jay-Z & Kanye West (sur l’album Watch the Throne, paru en 2011) ressemblent étrangement au début de la chanson SP 4Lovers de Misteur Valaire (sur l’album Friterday Night, paru en 2007). Et alors? Rien…

La culture, c’est comme l’air ambiant. Ça appartient à tout le monde et à personne à la fois. On survit en respirant… parfois les mêmes molécules d’air que nos pairs. Rien ne se perd, rien ne se crée, comme dirait l’autre.

Cette philosophie fondée sur le libre partage, la libre circulation et la libre modification de la création a inspiré Misteur Valaire en 2006; le groupe de musique rendait alors ses œuvres disponibles à tout le monde pour des fins non-commerciales.

À quand un accord Creative Commons – SOCAN?

Bravo à la SACEM! Est-ce à en croire que la SOCAN emboîtera sous peu le pas au Canada? Il le faudrait bien… Puisqu’en étant à la fois membre de la SOCAN et ayant opté en 2006 pour la licence Creative Commons (BY-NC-SA), Misteur Valaire est aujourd’hui «en conflit» à en croire le site de la SOCAN.

Le monde change. Certains s’adaptent, heureusement.

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Contrat Creative CommonsCet article La SACEM tend la main à Creative Commons par Guillaume Déziel est mis à disposition de la collectivité selon les termes de la licence Creative Commons BY-NC-SA (Paternité – Pas d’utilisation commerciale – Partage des conditions initiales à l’identique 3.0 Unported). Toute autorisation au-delà du champ de cette licence peut être obtenue au www.guillaumedeziel.com/contact/.

4 commentaires sur “La SACEM tend la main à Creative Commons

  1. À cet égard, il pourrait être utile de signaler à la SOCAN que l’extrait suivant de leur page, http://www.socan.ca/jsp/fr/pub/music_creators/creativecommons.jsp#seven, doit être mis à jour: «Jusqu’à maintenant, toutefois, aucune solution n’est annoncée, que ce soit au Canada ou ailleurs.»

    On pourrait notamment corriger ce passage en s’inspirant du site de la SACEM, à http://www.sacem.fr/cms/lang/fr/home/createurs-editeurs/creative-commons/experience-pilote-sacem-creative-commons, ce qui pourrait donner ceci: «Jusqu’à maintenant, une seule solution a été annoncée à cet égard, soit un projet pilote de 18 mois mené en France depuis le 1er janvier 2012. Ainsi, dans le cadre d’une entente conclue entre la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) et Creative Commons, les créateurs français qui souhaitent tenter l’expérience peuvent développer la promotion de leurs œuvres en ayant recours aux licences Creative Commons, option non commerciale (NC), tout en confiant la gestion de leur œuvre à la SACEM.»

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    1. @la musicienne
      Oui, tu peux choisir une licence Creative Commons pour ta musique qui permettrait à la fois à monsieur-madame-tout-le-monde de télécharger, remixer et partager ta musique (à des fins non-commerciales) ET qui te réserverait toute exploitation commerciale de ta musique. Si tu choisissais une licence Creative Commons BY-NC-SA, par exemple, celle-ci permettrait aux individus de faire un usage personnel non-commercial de ta musique; en revanche, elle interdirait tout usage commercial de ta musique à des entreprises qui ont une intention lucrative par rapport à ta musique.

      Dans le dernier cas, en te réservant exclusivement l’exploitation commerciale de ta musique, toi seule aurait le pouvoir d’émettre contre rémunération (donc de vendre) une licence (permission écrite) à une entreprise qui veut utiliser ta musique à des fins commerciales.

      Est-ce que je réponds bien à ta question?

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