La transparence, pour éviter les mirages

Le 1er juin 2011, lors du Forum du numérique et de la culture organisé par la SODEC, près de 200 acteurs culturels se sont rencontrés pour discuter du virage à prendre en culture, à l’ère numérique. D’ailleurs, pour les intéressés, voici le rapport final issu de cette rencontre : http://www.sodec.gouv.qc.ca/libraries/ocvn/documentnumerique2011.pdf

Lors de ce forum, Jacques K. Primeau était présent. Il était entre autres responsable d’un atelier portant sur la musique et le spectacle de variétés. Monsieur Primeau a lancé une analogie pour illustrer la situation de notre industrie de la musique. De mémoire, il a dit que notre industrie est comme « un troupeau de 40 personnes marchant dans le désert », désorienté, sans trop savoir où aller dans cette nouvelle réalité du numérique. Non seulement cette phrase a frappé mon imaginaire, mais elle l’a stimulé davantage.

AVERTISSEMENT : Si vous êtes dyslexiques et que lire vous fatigue les yeux, vous pourrez toujours visionner mes tergiversations mentales ici.

J’aurais effectivement tendance à dire que nous sommes une industrie errante, avançant dans un désert inconnu, sans trop savoir quelle direction prendre. Pire encore, je dirais que les réserves d’eau menacent de manquer éminemment.

Devant ce drame, plutôt que de risquer de se laisser collectivement mourir lentement, mais sûrement, en marchant tous ensemble dans la même direction, j’aurais tendance à croire qu’il serait bien de sacrifier quelques membres du troupeau pour le bien de notre collectivité.

Pourquoi ne dirions-nous pas à deux de ces 40 membres en perdition d’aller tester une direction précise? Pourquoi ne leur suggérions-nous pas de marcher en file indienne, de sorte que si le premier sombre sous les sables mouvants, le 2e puisse revenir en courant vers le troupeau et expliquer que ce n’était finalement pas la bonne direction à prendre… non? Et si nos 2 protagonistes trouvaient en fin de compte une oasis, alors ils pourraient s’y abreuver, reprendre des forces et revenir en courant vers le troupeau pour leur annoncer la bonne nouvelle, n’est-ce pas?

Transparence

Je vous parle de cette analogie pour suggérer la notion de transparence dans notre industrie musicale; ce qui est nécessairement une des valeurs que le Web impose.

Pour moi, l’idée de revenir en courant et d’informer le troupeau se résume très concrètement à faire des rapports, à rendre des comptes. À l’heure des chamboulements provoqués par l’Internet, il serait évidemment nécessaire de tester de nouveaux modèles, de tenter des directions qui puissent paraître risquées, voire fatales. Après tout, face à la mort, on n’a rien à perdre…

Si les programmes de subvention de la culture permettent parfois d’explorer de nouveaux horizons, à quoi servent-ils réellement si leurs résultats ne sont pas accessibles à l’ensemble de l’industrie?

Je crois profondément qu’à l’heure actuelle, il vaut mieux investir des milliers de dollars dans des programmes exploratoires, que de dépenser des millions en argent public dans des programmes désuets, mal adaptés aux nouvelles réalités du numérique et dont les résultats, souvent non optimisés, sont tenus à l’écart de la collectivité.

Argent public = données publiques

Je parle de transparence ici, puisqu’il s’agit après tout de l’argent des contribuables. Logiquement, tout argent public, qu’il provienne d’une municipalité envers des contracteurs privés, ou du ministère de la Culture envers des producteurs de musique, devrait être accompagné de comptes à rendre; du devoir de documenter.

Si un producteur obtient 50 000$ pour encastrer (embeder) un service de webdiffusion vidéo américain dans un site Web québécois, je veux le savoir. Non seulement en tant que contribuable, mais en tant que membre du troupeau, je veux connaître les détails de la demande de subvention et les résultats concrets qu’elle a engendrés, le cas échéant. Et tant pis si cela ne donne rien… Au moins, on l’aura su; cela nous évitera de faire deux fois la même erreur. L’accès public à ces données devrait donc revenir de droit aux contribuables, par défaut.

Du Crowdsourcing pour le bien collectif

En tant que société, il faut évidemment prendre le virage de la technologie; certes il faut le prendre avec transparence. Parce que le Web est fait de sorte que chacun devient un acteur de communication, il permet aux erreurs du passé d’être les solutions de demain. Heureusement.

En tant que collectivité, il est crucial que nos investissements rapportent – au bas mot – des connaissances pour tous et chacun; pour les générations d’aujourd’hui et de demain. Parce que nous payons tous pour nos programmes de subvention en culture, nous devrions tous pouvoir en retirer… au moins des connaissances. Cette idée me semble bien logique. Le Crowdsourcing est dans l’air, de toute façon.

Si les 2 membres du troupeau en question que l’on a choisi de sacrifier ne nous reviennent jamais, alors nous aurons tous compris que ce n’était pas la bonne direction à prendre. Mais si ces 2 personnes n’ayant rien à perdre nous reviennent en vie, saines et sauves, alors le risque qu’elles auront pris servira dignement notre collectivité, au grand bonheur de tous.

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